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Prévention jeunesse

 

Les risques liés à la pornographie

 

Cet article fait suite à la Causerie organisée par le Centre Hubertine Auclert le 6 juillet 2016
Pornographie : étape ultime de la libération sexuelle ou bien forme extrême d'aliénation des femmes ?

 
Leah, co-animatrice du groupe de travail Libération des sexualités des femmes à Osez le féminisme !
Benoit Kermorgant, sociologue et chargé de prévention au Mouvement du Nid 92
 
 

Qu'est-ce que  la pornographie ?

 

Usagers et préférences

Les représentations de la sexualité existent depuis la nuit des temps. Cependant, la pornographie (films) telle qu'on la connait ces 20 dernières années, en est une version extrême. Les revenus de l’industrie du mondiale du porno sont estimés à 96 milliards de $, le marché des USA comptant pour environ 13 milliards. Il y a, écrit Dines, « 420 millions de pages porno sur internet, 4.2 millions de sites Web porno, et 68 millions de requêtes porno dans les moteurs de recherches chaque jour. » [1] Ce large public quotidien, a plus de 95 masculin, rassemble plus de visiteurs que les géants Amazon et Twitter réunis.

Il y a encore quelques années, il fallait se déplacer pour louer un film, acheter sa revue ; aujourd'hui, la pornographie est gratuite et accessible en moins de deux cliques sur Internet. Elle est entrée massivement dans les foyers, sans aucun moyen de contrôles pour savoir qui visionne ces images.


Représentations

La pornographie n'est pas le film d'une représentation de la sexualité. La pornographie ce sont des violences sexuelles filmées. La plupart des scénarios sont avant tout des viols : la personne au départ n'est pas consentante, puis finalement le devient. Ce scénario fait directement écho au fantasme de l'homme dominant prenant plaisir dans la souffrance et la résignation qu'il inflige à la femme. C'est d'ailleurs le "Hardporn", soit la mise en scène de rapports sexuels caractérisés par leur extrême violence, qui a le plus de succès aujourd'hui.

L'image de la femme dans ces films relève de la misogynie : les femmes sont interchangeables, elles sont toujours pénétrées par un ou plusieurs hommes, en même temps ou de manière consécutive, elles sont classées "racialement", les dialogues se limitent à de la violence verbale, toujours à l'encontre des femmes. Ces dernières n'ont pas de désirs propres, elles sont là pour satisfaire leur partenaire, qui lui n'est là que pour son plaisir qui augmente par la violence infligée. Le plaisir des hommes est ainsi mis en corrélation avec les humiliations infligées aux femmes. Aujourd'hui, la plupart des vidéos mises en ligne sont de vrais viols filmés. [2]

 

Quelles sont les conséquences de la pornographie ?

 

Prédation sexuelle

La pornographie a un impact indéniable sur les violences faites aux femmes : banalisation et légitimation de rapports violents. Les petites filles aussi subissent les conséquences de ces films, notamment par une hypersexualisation [3] de leur corps. Aux Etats Unis, il est interdit depuis longtemps de faire apparaitre des mineurs, mais une loi de 2012 autorise de "rajeunir" les "actrices" pour que dans le scénario il puisse s'agir de petites filles. Il y a ainsi des films classés par mots-clés "fille et beau-père", "princesse à papa"... [4]

 

Impact sur les jeunes(et moins jeunes)

1 enfant sur 2 a vu un film pornographique avant ses 12 ans.

30% des consommateurs réguliers de la pornographie ont entre 13 et 14 ans.

La violence des scènes crée un traumatisme. Au début, lorsque la personne regarde le film ce qui s'exprime d'abord c'est son empathie : un peu comme avec un film d'horreur, elle se cache les yeux parce que ce qu'elle voit est perçu comme horrible, et elle le perçoit comme horrible parce qu'elle a identifié la victime et qu'elle s'est mise à sa place. Le temps passant, l'habitude venant, le spectateur se coupe de son empathie, il ne souffre plus à la place de la victime, il jouit à la place de l'agresseur.

 

Mimétisme et impact sur la santé publique

Les jeunes, mais aussi bon nombre d'adultes, ne prennent pas de recul par rapport à ce qu'ils voient. La sexualité n'est plus perçue comme une aventure à deux, mais comme une performance personnel pour assouvir un besoin personnel.

La pornographie ou cyber-porno entraine aussi une dépendance avec un besoin d'en voir toujours de plus en plus souvent, avec des scénario toujours différents et de plus en plus violents également. Des psychiatres étudient ainsi les phénomènes d'addiction propre à la pornographie qui associe à une réalité supposée de la sexualité, une coupure des affects propre a priori aux relations intimes. [5]

Bon nombre de jeunes visualisent ces sites dans l'optique d'obtenir des renseignement sur la sexualité et sur le "comment faire". Conséquence, les rapports sexuels des jeunes sont extrêmement violents. Les garçons reproduisent ce qu'ils ont vu et les filles se conforment à ce qu'elles voient et à ce qui est attendu d'elles.

Les différents degrés du mimétisme :

  • reproduction des violences vues comme banales
  • reproduction de rapports sexuels le plus souvent non protégés
  • ignorance du concept de consentement puisque le porno joue sur le vieux cliché/fantasme que quand une femme dit "non" elle dit "oui".

L'impact de la pornographie sur la santé publique est donc très lourd.

 

Pornification de la société

Cette soumission et humiliation des femmes ne se limite pas à la pornographie. La domination des femmes se retrouve aussi dans les publicités, les clips musicaux et bien d'autres supports... Elle met en scène, au quotidien, des rapports inégaux et engendre une banalisation des violences. Si les adultes qui entourent les jeunes ne remettent pas en question ces mécanismes, comment le jeune le peut-il ? Ce dernier prend alors pour légitime des repères qui prônent des rapports de violence.

 

Démonstration en images :

 

 

 

Comment prévenir et en parler ?

 

Toute personne peut proposer un dialogue ouvert et sans jugement sur des sujets délicats. Ne pas faire de la sexualité un tabou est le meilleur moyen pour les jeunes de parvenir à s'exprimer dessus et de ne pas se tourner vers des sources dangereuses pour eux.

Il est aussi possible de passer le relais à des partenaires, spécialisés sur ces questions.
Quelques partenaires possibles :

  • L'éducation nationale propose de nombreuses ressources possible pour aborder la sexualité avec les enfants et les adolescents, avec des contenus adaptés à chacun des âges. Eduscol.fr
 
  • L’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé) : Interventions sur site, abordant l’ensemble de ces thèmes, adaptés aux enfants/jeunes. Leur site est également un véritable lieu ressource pour les jeunes et les intervenants. inpes.sante.fr/default.asp
 
  • Le CRISP (Centres régionaux d’information et de prévention du sida): Présent dans huit régions et propose des formations sur site, sur de nombreuses problématiques (santés, drogues, discriminations...). Egalement de nombreuses ressources et brochures de prévention. www.lecrips.net/reseau.htm
 
  • C’est malade!est un blog universitaire spécialisé en jeunesse créé en 2010 par ComSanté, Centre de recherche sur la communication et la santé de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). SEXOclic.ca, un nouvel espace interactif de référence portant sur l’éducation à la sexualité. Destinée aux intervenants jeunesse (acteurs du monde scolaire, du réseau de la santé et des services sociaux et du milieu communautaire), cette plateforme web propose un ensemble de ressources informatives et pédagogiques accessibles, actuelles et de haute qualité portant sur le thème de la sexualité. http://blogsgrms.com/cestmalade
 
  • « Pass Santé Jeunes »a été conçu sous l’égide de l’Agence Régionale de Santé de Bourgogne. L’ARS a pour mission de mettre en place la politique de santé dans la région. Elle est compétente sur le champ de la santé dans sa globalité, la prévention, le soin et l’accompagnement médico-social. L’objectif n°1du Pass Santé Jeunes de Bourgogne est de rendre les jeunes acteurs de leur santé ! Autour de 12 thèmes – tabac, alcool, toxicomanies, usages d’internet, mal-être, nutrition, risques auditifs, amour et sexualité, relation avec les autres, accidents de la route et domestiques, connaissance de l’environnement de protection sociale. L’objectif n°2est de mobiliser, structurer, animer et engager un réseau d’acteurs (partenaires participant à l’animation de la vie adolescente et familles) dans une démarche commune de promotion de la santé des jeunes, autour d’un corpus commun et d’un référentiel fiable et actualisé. www.pass-santejeunes-bourgogne.org
 
  • Education sexuelle, ce site a pour premier objectif que la pornographie ne soit plus le premier site de ressouces pour le sjeunes qui se posent des questions. Le site est conçu sous deux espaces : adolescent et parents. Les contenus sont enrichis de témoignages de médecins. (gynécologues, psychiatres, sexologues…). www.educationsexuelle.com
 
  • Je, Tu, Il…: Cette association propose des formations en région parisienne. Elle a également réalisé un documentaire en 2003, portant sur la vie affective des adolescents. www.jetuil.asso.fr/index.php?id=accueil
 
Avec les petits :
  • Deci-Delà : Association pour la sensibilisation des enfants/jeunes et l'accompagnement à la construction de projets citoyens : vivre ensemble, interculturel, handicap, développement durable, relations filles-garçons, violence... www.deci-dela.org

 

 

[1] La pornographie c’est ce à quoi ressemble la fin du monde, par Chris Hedges, le 17 mars 2015, Arts Visuels Littérature Société

[2] L’impuissance comme idéal de beauté des femmes – l’infantilisation et la sexualisation, sur antisexisme.net

[3] www.culturereframed.org

[4] Pornland, Gail Dines, 2010

[5] Votre cerveau dans le porno, Gary Wilson, TED Conférence, 2012, Glasgow

 

 

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